Par Badylon Kawanda Bakiman
Malgré les efforts du gouvernement central, des ONGs et d’autres partenaires, la malaria sévit toujours dans la province du Kwilu dans le sud-ouest de la République démocratique du Congo (RDC). Les activistes des droits humains s’inquiètent et invitent les autorités et leurs partenaires à multiplier les efforts pour améliorer la situation.
Il est 12 h33’ ce jeudi 26 août 2021. Josseline Ndaka, 13 ans, est dans la ‘’Salle d’urgence’’ de la ‘’Clinique Kiyankayi’’ de la ville de Kikwit entre les mains du personnel soignant. Elle a une grande fièvre, une faiblesse physique considérable accompagnée des difficultés respiratoires et de l’anémie. Quelques fois elle a des palpitations.
«Il s’agit d’un cas de paludisme grave, forme anémique. Nous recevons plusieurs fois des cas pareils», déclare le Dr Paulin Kiyankay, médecin traitant et responsable de la clinique.
De juin jusqu’au 26 août 2021, cette clinique a enregistré 223 cas de malaria grave, renseigne Atweka Bienvenue, infirmière responsable de la réception des patients.
De son côté, Pauline Longoto, femme enceinte du territoire d’Idiofa, vient de sortir de l’hôpital.
«Je vomissais beaucoup. J’avais aussi des maux de tête, des douleurs abdominales, la diarrhée… Après les examens au laboratoire, le laborantin m’a parlé de la forme digestive de la malaria grave. Je continue à prendre les antipaludéens prescrits», témoigne-t-elle.
A Gungu, territoire situé à plus de 100 kilomètres de Kikwit, toujours dans la province du Kwilu, un enfant de quatre ans, Jean Muntu, est décédé le 13 juillet 2021.
«Nous sommes allés un peu en retard à l’hôpital faute de moyens financiers. Mon fils avait toujours la fièvre. Il vomissait, avait la diarrhée. Il est devenu pâle, n’avait plus d’équilibre. Nous n’avons fait que deux jours à l’hôpital avant qu’il ne meure», indique sa mère Thérèse Ngolo, anxieuse.
Quant à lui, Odon Mfumu est toujours sur le lit d’un centre de santé de Kikwit.
«Nous le laissons dormir, car il vient de prendre le traitement. Il s’agit d’un autre cas de paludisme grave», affirme Anny Mingolo, infirmière.
Rien qu’au mois de juillet 2021, le ‘’Centre de santé Kasita’’ a enregistré 17 cas du paludisme grave.
Josseline Ndaka, Pauline Longoto, Jean Muntu et Odon Mfumu sont parmi les milliers des patients qui souffrent régulièrement de la malaria dans la province du Kwilu en particulier et en RDC en général, malgré les efforts du gouvernement congolais, des ONGs et des partenaires.
Tous les trois ou cinq ans, le gouvernement congolais, avec l’appui financier de ses partenaires internationaux comme ‘’Fonds Mondial’’, distribuent gratuitement aux familles des moustiquaires imprégnées d’insecticides pour se protéger contre cette maladie.
En 2018, la RDC comptabilisait le deuxième nombre le plus important de cas de paludisme et de décès de cette maladie dans le monde (12 % des cas et 11 % des décès) et 54,6 % des cas en Afrique centrale, indique ‘’Severe Malaria Observatory’’, une des structures spécialisée en cette matière.
Cette structure ajoute également qu’en 2018, le paludisme faisait partie des principales causes de morbidité et de mortalité en RDC, représentant 44 % de l’ensemble des consultations en ambulatoire et 22 % des décès.
«Environ 97 % de la population vit dans des zones où la transmission du paludisme est stable pendant de 8 à 12 mois par an. Les niveaux de transmission les plus élevés sont observés dans les zones situées au Nord et au Centre du pays», note-t-elle.
L’organisation de la lutte contre le paludisme en RDC est assurée par le PNLP (Programme national de lutte contre le paludisme) créé par l’arrêté Ministériel N° 1250/CAB/MIN/SP/008/1998 du 22 Juillet 1998.
Son mandat consiste à définir la politique générale de lutte contre le paludisme, faciliter le partenariat avec les autres secteurs publics et privés, planifier et coordonner les activités de lutte contre le paludisme, assurer le plaidoyer de « Faire Reculer le Paludisme » pour l’appropriation par les différents partenaires et la mobilisation des ressources nécessaires pour la mise en œuvre.
Des son côté, depuis plusieurs années, SANRU (Soins de Santé primaires en milieu Rurale), une des ONGs partenaires du gouvernement, est engagée dans la lutte contre le paludisme en RDC dans le secteur public et cette lutte s’étend aujourd’hui dans le secteur privé.
C’est dans ce contexte que SANRU a organisé une réunion avec les importateurs de produits pharmaceutiques en RDC, ce mercredi 28 Août 2019 dans la salle de la Fédération des Entreprises du Congo à Kinshasa, la capitale.
En 2016, la CNRSC (Coordination nationale de renforcement du système communautaire), une ONG spécialisée en matière de santé et partenaire du ministère de Santé en RDC, avait formé 676 ‘’Acteurs communautaires’’ concernant les généralités sur le paludisme, les techniques de communication, suivi et reportage afin de bien lutter contre la malaria.
Après formation, les autorités politico-administratives, les leaders religieux et communautaires avaient signé un acte d’engagement pour lutter contre le paludisme.
«S’il y a beaucoup de résistance c’est puisqu’il y a plusieurs cas d’automédication, l’usage abusive de la quinine, l’usage des produits prohibés, le non assainissement des milieux de vie, paludisme mal soigné, non utilisation des moustiquaires imprégnées d’insecticide par plusieurs familles, retard des soins etc.», explique le Dr Kiyankay.
«Le gouvernement et ses partenaires doivent tout faire afin d’améliorer la situation. La population a droit à une bonne santé. La population a aussi le droit d’accéder facilement aux soins de santé primaire. La lutte contre la pauvreté doit se faire quotidiennement», déclare Maitre Valentin Mbalanda, un des activistes des Droits humains en RDC.